Boubou Hama: le grand témoin et la mémoire de l’AOF
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Description
Etablir la bibliographie d’un homme comme Boubou Hama conduit à remonter l’histoire sociale et institutionnelle de l’Afrique Occidentale Française. Né à Fonéko, petit village songhaï à l’ouest du Niger, il étudie d'abord à l'Ecole préparatoire de Téra de 1916 à 1918, puis à l'Ecole primaire régionale de Dori, commune anciennement située en Haute-Volta et annexée à la Colonie du Niger, lors du partage de la Haute Volta entre la Côte d'Ivoire, le Soudan français (Mali) et le Niger. Puis, Boubou Hama est envoyé à l'Ecole élémentaire supérieure Ouagadougou, afin de préparer le concours d'entrée à la célèbre École normale William Ponty de Dakar à laquelle il est admis en 1926. Cette simple évocation nous oblige à nous arrêter sur cette école William Ponty. Créé en 1903, ce qui fut d’abord appelé Ecole Normale Fédérale ne devint École Normale William Ponty qu’en 1915. Elle doit son nom à William Amédée Merlaud-Ponty, gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française, de 1903 à sa mort en 1915. C’est l'Ecole normale fédérale de l’Afrique-Occidentale française. Cet établissement a formé la plupart des instituteurs, médecins et cadres d’Afrique de l'Ouest, dont de nombreux ministres et chefs d’État ou de gouvernement, tels que Félix Houphouët-Boigny, Modibo Keïta, Hubert Maga, Mathias Sorgho, Hamani Diori, Mamadou Dia, Bernard Dadié, Emile Derlin Zinsou ou Abdoulaye Wade. Pour en revenir à Boubou Hama, en 1929, il devient le premier instituteur nigérien. Il est d'abord affecté à l'Ecole régionale de Niamey avant d'être affecté à l'Ecole élémentaire de Tillabéri en 1935. En 1938, il est muté à Niamey, avant d'être muté à l'Ecole régionale de Dori en 1945. En 1933, il rencontre à Tillabéri le Docteur Boulnois (Un médecin des troupes coloniales déjà auteur d'ouvrages sur les coutumes et croyances dravidiennes de l'Inde) avec lequel il publiera plus tard L'Empire de Gao en 1954. Une œuvre publiée par une maison d'édition scientifique qui propulse Boubou Hama dans le cercle des chercheurs d'envergure universitaire. Amorcée par la publication du livre L'Empire de Gao : histoire, coutumes et magie des Sonrai en 1954, l’écriture de Boubou Hama est surtout marquée par l’histoire et les recherches sur l’histoire des peuples, la défense des cultures africaines. Quelques titres pour comprendre. Histoire du Gobir et de Sokoto, en 1967 ; Kotia-Nima 1 : rencontre avec l'Europe, Paris, en 1968 ; Histoire traditionnelle d'un village songhay, Fonéko, en 1970 ; Contes et légendes du Niger, en 6 volumes de1972 à 1976 ; Écrits sur le Soudan, en 1983. Il laisse une œuvre considérable sur la culture africaine. C’est ce grand témoin de l’évolution historique et politique de l’Afrique Occidentale Française qui nous intéresse ici. Pour plus de clarté, il nous faut nous arrêter un instant sur l’histoire du Rassemblement Démocratique Africain. La Deuxième Guerre mondiale vient de s’achever. C’est une France vaincue et occupée dans les premières années de la guerre, qui s’est appuyée sur ses colonies pour remporter la victoire de 1945 aux côtés de ses alliés. Il est clair pour tous que le système colonial ne peut plus continuer avec le code de l’indigénat. La loi Lamine Guèye introduit des réformes en 1946 comme l’abolition du travail forcé, de l’indigénat ainsi que l’obtention de la citoyenneté française pour les habitants des territoires d’outre-mer. Mais, le compte n’y est pas. Autour du Général De Gaulle, le nouveau pouvoir propose une nouvelle Union française dans le cadre d’une nouvelle constitution. En face, il y a le Rassemblement démocratique africain (RDA), une fédération de partis nationaux largement autonomes, qui est mis sur pied, le 21 octobre, sous la présidence du