Description
Cet épisode est initialement paru dans l’épisode 104 du podcast Proxi-jeux.
Cette saison de podcast est consacrée à l’exploration en long, en large et de travers des jeux dits de placement d’ouvriers.
Le précédent épisode dressait un triste constat de la condition de pion-ouvrier. Ce mois-ci, on revient sur les thèmes et sujets abordés par les jeux de gestion : développement économique, vision productiviste et utilitariste de l’individu, noblesse du leader.
La mécanique elle-même est un élément à part entière du discours mis en scène par le jeu. Il s’agit certes de jeu mais il symbolise et transmets une vision du monde, consciemment ou inconsciemment orientée. Sachons-nous en souvenir et bousculer les clichés établis !
Sont cités dans cet épisode :
L’article “Décoloniser Catan” sur le blog de l’auteur de jeux Bruno Faidutti
La transcription intégrale de l’épisode est ci-dessous, bonne écoute !
Bonjour les joueuses et les joueurs, c’est toujours l’Acariâtre, et plus remonté que jamais.
Dans l’épisode précédent, je constatais le triste sort des pions ouvriers, faux personnages et vraies ressources à forme humaines. Intéressons-nous cette fois aux thèmes du genre.
Comme j’ai déjà pu le dire le placement d’ouvriers constitue un genre à part entière, centré sur un aspect essentiellement mécanique. À première vue, il pourrait donc accueillir n’importe quel contexte narratif. Mais, comme je le répète sans me lasser, le placement d’ouvriers impose en réalité son matériel (les pions ouvriers et les lieux-actions) et donc une forme de justification thématique : envoyer une équipe de petits meeeples au travail.
Dans les faits donc, les jeux de placement d’ouvrier s’inscrivent très généralement dans des thématiques de développement économique. Que ce soit pour faire prospérer sa tribu à l’âge de pierre, faire survivre sa famille d’agriculteurs ou construire la bombe atomique.
L’interaction y essentiellement indirecte. Par opposition aux jeux d’affrontement, on ne détruit pas ici les ressources des autres joueuses mais on les bloque dans leur développement en acquérant une ressource ou une action avant eux.
Une question tout de même ? Pourquoi les jeux de gestion, appréciés essentiellement pour leurs qualités mécaniques, s’embêtent à se doter d’un thème. Cela répond en fait à plusieurs objectifs :
Donner un contexte et une justification à la partie. Ou autrement dit accrocher la joueuse ;
Faciliter la compréhension des règles. Ou autrement dit aider la joueuse ;
Attirer les joueuses par des promesses d’immersion. Ou autrement dit transporter la joueuse.
Le placement d’ouvriers est particulièrement adapté aux deux premiers objectifs. Les thématiques de conquête et développement sont variées et valorisantes. De plus, la mécanique est très accessible, directement lisible et concrète par son matériel et son iconographie. Le placement d’ouvriers est d’ailleurs une rare mécanique centrale qui est thématiquement intégrée au jeu. En effet il n’y aucune justification thématique à la pose de tuiles dans Carcassonne ou au draft de cartes bâtiments dans 7 Wonders. En revanche il est thématiquement logique d’envoyer ses petits ouvriers aller récupérer du bois en forêt. Cela simplifie grandement la jouabilité immédiate de ce genre de jeux.
Mais le troisième objectif du thème, l’immersion, n’est souvent qu’une vaine promesse. L&rsq