Description
17 décembre 2010. L’humiliation de trop ! Mohamed Bouazizi s’immole par le feu. Par le sacrifice d’un de ces êtres méprisés par les régimes imbus de leur toute-puissance, l’Histoire bascule. Dans le monde arabe, certes, mais c’est en Afrique ! Depuis un an, des pouvoirs réputés inébranlables se sont effondrés, comme pour rappeler aux dirigeants politiques qu’il vaut mieux s’assurer d’avoir réellement le suffrage – l’adhésion – de leurs peuples, pour espérer gouverner sans craindre d’être chassé, comme Ben Ali, arrêté, comme Moubarak ou Gbagbo, ou lynché, comme Kadhafi.
Que disent les oracles ? Les élections gagnées à la faveur d’irrégularités patentes ne vous mettent à l’abri de rien ! Les victoires remportées sur une opposition muselée ou contrainte au boycott par un dispositif grotesque de fraude ne signifient rien ! Les scores vertigineux (70%, 80%, 90%) ne sont que vanité, si les populations qui vous les accordent sont tenues par la terreur ! Les scores inférieurs à la majorité qui vous font roi, parce que vous avez décidé, subitement, un jour, de changer le mode de scrutin pour une proportionnelle de convenance, sont tout aussi vains !
C’est de légitimité que l’on vous parle ! Le vote ne peut être une formalité que l’on expédie vite, dans une impréparation visible à l’œil nu, juste pour renouveler son bail à la tête d’un Etat, pour perdurer au pouvoir. Dans l’Afrique d’aujourd’hui, les élections approximatives, avec des irrégularités que l’on minimise, comportent plus de risques que d’avantages. La meilleure assurance contre une fin humiliante ou même tragique est de s’assurer que l’on tient sa légitimité de la majorité de son peuple, et que l’on gouverne bien.
Bien sûr, il y aura toujours dans l’entourage d’un chef d’Etat (surtout en Afrique), des courtisans, pour lui faire croire qu’il a le peuple avec lui, même quand ce n’est pas le cas. Mais lorsque les choses tournent mal, les foules en colère ne pourchassent pas les courtisans et les griots. Qui se souvient de Moussa Ibrahim, éloquent porte-parole du colonel Kadhafi, qui se mentait à lui-même et a menti, jusqu’au bout, à son maître ?
L’Histoire est en marche ! En lettres de feu et de sang, Mohamed Bouazizi en a écrit les premières lignes. Les peuples arabes et africains savent, à présent, que ce sont eux qui auront le dernier mot. Ils ont beau être écrasés par les tyrans, abusés par les despotes ou floués par les margoulins, l’heure a sonné pour chaque peuple de s’écrier : « nous n’avons plus peur ! Nous ne nous laisserons plus faire ! ».