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A Washington, où ils prenaient part, cette semaine, aux assemblées de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, les grands argentiers de l’Uemoa et de la Cémac avaient surtout à cœur d’être rassurés quant à l’avenir du franc CFA. Le directeur général du FMI leur a donné toutes les assurances qu’ils désiraient, les mêmes, d’ailleurs, que celles données, le 18 septembre, à Paris, par le ministre des Finances et les responsables de la Banque de France et du Trésor français.
Mais que valent de telles assurances, dans le magma d’incertitudes dans lequel baigne l’économie mondiale ? Qui peut, dans la tourmente qui règne aujourd’hui sur les marchés financiers, rassurer qui que ce soit, sur quoi que ce soit ? La crise de la dette souveraine dans la zone euro affole jusque dans les pays émergents. Et elle devrait, ô miracle !, épargner la Zone franc.
L’heure n’est-elle pas plutôt à une réflexion sérieuse et déterminée sur des politiques monétaires africaines, au-delà du franc CFA, arrimé à l’euro, et dont un économiste iconoclaste dit qu’il est « une monnaie de riche pour des pays pauvres ».
Lorsqu’ils ploient sous leurs dettes, les pays riches peuvent, entre autres, vendre une partie de leur patrimoine. Privatiser la gestion des autoroutes, par exemple. Qu’en est-il des Etats africains ? Certains ont déjà perçu des royalties à valoir sur l’exploitation future des richesses de leurs sous-sols. Et pour les décennies, parfois. A présent, ils en sont réduits à vendre leurs terres !
Invité de Nathalie Amar, sur ces ondes, au moment même où les grands argentiers africains se consolaient avec les assurances de Madame Lagarde, Luc Nyakadja (*) rappelait que la désertification, pas plus que la sécheresse, ne s’arrête aux frontières. Et que l’insécurité alimentaire est devenue un secteur rentable pour les multinationales et autres spéculateurs, qui achètent les terres par dizaines de milliers d’hectares, dans une Afrique qui dépenserait encore quelque 33 milliards de dollars, chaque année, pour combler son déficit en produits alimentaires.
Que reste-t-il donc à un peuple qui en est réduit à vendre la terre qui le nourrit, qui devrait le nourrir ?
Comme dit le vieil Indien, dans la chanson, quand vous ne possédez pas le bruit des sources, ni la forêt, ni l’horizon, comment pouvez-vous céder l’oiseau, le nuage nacré, les insectes dans le buisson, la brise qui raconte l’histoire de votre peuple à vos enfants ?
Lorsque l’on en vient à vendre le sol dans lequel dorment les anciens, il faut se préparer à finir dans des réserves.
(*) Secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (Invité « Afrique Soir », le 21 septembre 2011).