Description
Lorsque Robert Bourgi, à haute voix, s’abandonne à ses épanchements, l’Afrique, éberluée, n’a plus qu’à s’exclamer : « c’était donc vrai, toutes ces histoires de mallettes que l’on nous racontait ! ». Ses détracteurs et certains de ses anciens amis l’ont traité de « mystificateur » et de « mythomane ». Donateurs et bénéficiaires désignés, à l’unisson, l’ont accusé de conter des « fariboles » et l’ont menacé de poursuites judiciaires. Cela n’a plus aucune importance aux yeux des Africains : les pratiques que décrit par le menu Robert Bourgi correspondent tellement à ce que tous soupçonnaient !
Ses révélations confortent certaines élites dans ce qu’elles savaient, sans en avoir toujours la preuve. Et, d’ailleurs, le repenti lui-même dit ne pas en avoir. Mais qui, mieux qu’un acteur ayant vécu tout cela de l’intérieur, peut rapporter avec autant de précisions le cérémonial ?
La question, pour les Africains, n’est vraiment pas de savoir quelles motivations sous-tendent les révélations de l’avocat. Peu importe que ce soit par dépit, par remords ou même par de malicieux calculs. Le système qu’il se repent d’avoir perpétué en l’alimentant a, de son propre aveu, contrarié la démocratie et freiné le développement de l’Afrique. Et cela est bien plus important que les noms qu’il cite ou ne cite pas.
Il parle d’un réseau qui a soutenu des « potentats » africains, « rejetés par leur peuple ». On prête même à Jacques Foccart d’avoir, à l’époque de sa toute puissance, directement ou indirectement pesé sur le destin des Etats africains, en décidant de qui devait diriger tel pays, et qui devait être écarté du pouvoir dans tel autre. Pour un dirigeant africain, admettre avoir livré des valises serait un terrible aveu d’illégitimité.
Comme on les comprend !
Si la Françafrique est un fléau, il est bien spécifique aux anciennes colonies ou pays sous tutelle française. Une partie des élites africaines a, très tôt, dénoncé ces pratiques comme étant une façon de vider de sa substance la souveraineté des Etats nouvellement indépendants. Certains l’ont d’ailleurs payé très cher.
Lorsque Nicolas Sarkozy affirme que c’est au nom de la démocratie et de toutes autres valeurs chères à la France qu’il a impliqué son pays dans les crises ivoirienne et libyenne, nombre d’Africains en doutent, à cause, justement, de la suspicion vis-à-vis de la Françafrique.
Et pour que la démocratie s’enracine durablement dans cette Afrique-là, certaines pratiques politiques doivent fondamentalement changer dans la vie politique en France !