INCUBUS : réapparition d’une perle maudite
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Description
Injustement nanardisé par sa particularité (il est parlé en Esperanto), Incubus savait surtout prendre langue avec les meilleurs contes gothiques. Mais qu'est-ce qui est passé par la tête de Leslie Stevens ? En 1968, ce cinéaste a acquis un statut d'excellent faiseur hollywoodien, insufflant à des registres variés, du drame social au film de chevalerie, un regard très personnel sur les rapports humains. Voilà qu'il se lance dans une aventure des plus singulières avec Incubus. C'est un film à mi-chemin entre les tourments existentiels d'un Bergman et l'imaginaire gothique autour d'une histoire de femme démon ensorcelant les hommes d'un village de pêcheurs jusqu'à tomber amoureuse d'une de ses proies. Sauf qu'Incubus sera l'un des deux seuls films de l'histoire du cinéma à être tourné en espéranto. La logique de rendre universelle le fond de ce récit via une novlangue farfelue, censée pouvoir être parlée par tout le monde, peut s'entendre. Mais elle fera d'Incubus un film énoncé dans un sabir improbable, lui procurant une telle réputation de nanar qu'il sombra quasi immédiatement dans les limbes de la cinéphilie. À tort, quand cette malheureuse particularité linguistique aura occulté une dream-team comme on en verra rarement (de Stevens à la mise en scène aux géniaux Conrad Hall et Dominic Frontier à la photo et la musique) comme une fable noire sur la dévorante part possessive de l'amour. Porté disparu jusqu'à la découverte d'une copie dans les caves de la cinémathèque française, Incubus réapparait aujourd'hui en Blu-ray dans une restauration étincelante, révélant autant sa splendeur visuelle expressionniste que révélant que la langue que ce film maudit parlait le mieux, était celle des grands drames mélancoliques. Il serait dommage de faire à nouveau échouer dans l'oubli cette relecture crève-cœur du mythe des sirènes. Edité par Le chat qui fume.
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